Les songes d’Aurore

Ce matin, Aurore a rassemblé toute sa volonté pour quitter son lit moelleux. Elle a descendu les marches lentement, concentrée sur ses pieds si légers, si silencieux. Elle a effleuré le bois et s’est accrochée à son odeur pour ne pas s’évanouir trop tôt. Elle voulait sentir le soleil sur son visage une dernière fois.

Dans cet escalier, elle a perdu l’ombre de ses clavicules, si délicates, et le doux renflement de sa poitrine.

Elle a ensuite traversé l’espace qui séparait la cuisine de la salle à manger et, pas après pas, atteint la porte d’entrée. Son manteau marron, râpé aux manches, était suspendu avec les autres. Mais ce matin, le soleil d’octobre brille et il y a bien longtemps que sa peau crémeuse ne souffre plus du froid.

A la porte, elle a laissé le bouton sombre de son nombril et les sillons des paumes de ses mains.

La voilà dehors, enfin. Aurore traverse la rue et le souffle d’une voiture l’effleure, manquant de justesse de l’emporter. Elle se concentre sur sa respiration et y accorde le rythme de ses pas. Elle atteint le premier banc et s’y assoit délicatement pour reprendre des forces. Elle aurait aimé aller plus loin, mais ses pieds se sont évanouis. Alors, elle reste là, et laisse son regard glisser le long des marronniers aux feuilles rouges. Puis, bien malgré elle, ses paupières glissent comme un rideau devant ses yeux.

De l’autre côté, le parfum capiteux et chaud de la jungle envahit ses narines. Elle ouvre les yeux pour découvrir un univers sombre et luisant. Des gouttes de nectar glissent le long des courbes enchevêtrées des plantes grasses et des centaines de papillons lumineux s’y abreuvent dans un délicat froissement d’ailes. Ils laissent des sillons de poussière pailletée dans les délicats ouvrages des araignées et font la course avec des aras aux couleurs éclatantes. Charmée, Crépuscule secoue ses longs cheveux dorés et s’étire voluptueusement, puis part en quête de son Aventure.

Son pas est léger et infatigable. Elle progresse sur le sentier sans difficulté. Une lumière mouchetée dessine des tatouages éphémères sur sa peau blanche. Des singes agiles descendent la saluer et, se balançant de liane en liane, l’accompagnent en criant des encouragements. Un tigre la suit du regard, confortablement installé sur une branche. Enfin, l’instinct de Crépuscule lui souffle de s’arrêter et de repousser un dernier rideau de lianes. Le ciel apparaît d’un bleu profond. La rivière gronde en cascade et vient se jeter à ses pieds en un lac de la même couleur. Une muraille de roche se découpe à contre-jour, sur laquelle la végétation hardie s’agrippe.  Et dans ce fouillis vert et gris, Crépuscule distingue un visage. Elle laisse échapper un rugissement de triomphe.

Le cri d’un enfant fait frémir Aurore et ses paupières se soulèvent péniblement. Ils sont quatre qui jouent ensemble à pourchasser les pigeons et à se jeter dans les feuilles mortes. Elle sent le coin de sa bouche se relever juste avant que ne disparaisse son dernier sourire.

Il est trop tard pour reculer, maintenant. Elle n’a plus de voix pour raconter ce qui lui arrive, cet étrange phénomène qui, peu à peu, l’efface de ce monde pour l’emmener ailleurs. Elle ressent un bref élan de panique suivi d’un intense soulagement. Trop tard. Tant mieux.

Si elle avait encore sa voix, elle aurait pu raconter l’exact moment où elle s’était aperçue du subtil changement qui s’opérait en elle. Sa mère avait crié dans l’escalier que le repas était prêt. Aurore avait levé les yeux de son livre et son regard avait rencontré son reflet dans le miroir de sa coiffeuse. Quelque chose l’avait poussée à se rapprocher. Ses cheveux étaient si clairs sur son teint de porcelaine qu’il était presque impossible de le remarquer. Et pourtant, au fur et à mesure que l’émotion rosissait ses joues, elle ne pouvait nier qu’un sourcil lui manquait. Elle avait touché son visage et n’avait rien senti. C’était comme s’il n’avait jamais existé.

Comment allait-elle faire, le lendemain, au collège ? Tout le monde allait se moquer d’elle. Aurore s’était mise à pleurer, puis une étrange torpeur s’était emparée d’elle et avait calmé peu à peu ses sanglots. Elle avait finalement trouvé le courage de descendre. Ses parents sauraient quoi faire. Peut-être l’autoriseraient-ils à manquer les cours le temps que son sourcil repousse ?

Mais ils se disputaient pour la énième fois avec Alban lorsqu’elle s’était discrètement assise à sa place. Son frère était encore rentré après minuit, la veille, et avec un œil au beurre noir en prime ! Pour son père, c’était la goutte d’eau, après le bulletin catastrophique qu’ils avaient reçu. Depuis qu’il traînait avec « la bande », Alban séchait les cours et rentrait de plus en plus tard, en laissant derrière lui un sillon malodorant, mélange de parfum bon marché, de tabac froid et d’alcool. Voûté sur sa chaise, il résistait à l’avalanche de reproches, une expression butée sur le visage. Depuis son bout de table, Aurore l’observait avec fascination. La tache noire s’épanouissait autour de son œil et quelques poils de moustache poussaient au-dessus de sa lèvre supérieure, entre deux boutons d’acné. Enfants, ils se ressemblaient comme deux gouttes d’eau malgré l’année qui les séparait. A présent, cette année aurait pu en valoir mille. Même son mutisme grondait comme un orage. Ses yeux gris à lui lançaient des éclairs et sa bouche close dans une moue insolente suggérait des insultes, il shootait dans les pieds des chaises, montait quatre à quatre les marches et claquait la porte de sa chambre. Même absent, il était omniprésent dans les conversations de leurs parents. Trop occupés à se lancer des reproches et des menaces, ils n’avaient même pas remarqué qu’elle avait quitté la table sans rien avaler.

Au collège, le lendemain, elle avait gardé la tête baissée aussi souvent que possible, travaillant en silence derrière le fin rideau de ses cheveux blonds. Pas plus que ses parents, ses camarades de classe ne remarquèrent le changement. Elle espérait vaguement qu’un professeur l’interroge, où que sa voisine de table lui demande une copie double, mais rien ne s’était produit. Elle était rentrée la tête pleine de conversations avortées et le cœur encore plus lourd qu’à l’aller. La torpeur l’avait cueillie dès son retour et elle s’était laissée emporter avec soulagement dans le monde de ses rêves.

Trois jours plus tard, son deuxième sourcil avait disparu à son tour. Cette fois, elle n’avait pas pleuré. Le soir, elle était descendue se mettre à table avec la ferme intention de parler du phénomène. Mais sa mère n’avait posé que trois couverts et sa famille se servait déjà en discutant avec animation des vacances de Noël. Alban refusait catégoriquement de partir avec eux chez Mamie. Trois marches plus haut, Aurore les contemplait tandis que son âme se brisait en mille morceaux derrière sa bouche close. Lentement, elle avait fait demi-tour pour aller se coucher.

Aurore avait mis beaucoup de temps à émerger du sommeil, le lendemain. Lorsqu’elle avait enfin repris conscience, elle avait déjà manqué ses deux premières heures de cours. La maison était totalement silencieuse. Elle avait couru jusqu’au collège et était arrivée au moment où la sonnerie signalait la fin de l’interclasse. Sa professeure de Français lui avait jeté un regard indifférent tandis qu’elle sortait son classeur. Voulant se faire pardonner son absence, Aurore avait levé la main pour répondre aux questions posées, mais on ne l’avait pas interrogée. L’engourdissement qui ne cessait de l’envahir l’empêchait de rester concentrée. Elle s’était assoupie, avait rêvé qu’elle faisait valser toutes ses affaires, qui se transformaient en oiseaux de toutes les couleurs et chantaient des formules de maths en s’envolant.

Aurore s’était réveillée péniblement, lentement, en sentant encore sur sa joue la caresse des plumes. Le monde autour d’elle avait perdu sa netteté. A ses doigts, ses ongles s’étaient évanouis, et, sous la table, le dessin de ses genoux aussi. Elle avait fini par émerger, et avait longuement dévisagé sa voisine, perplexe. Elle ne reconnaissait pas cette fille beaucoup plus petite qu’elle, qui traçait avec application des formes géométriques sur son cahier. Elle avait finalement réalisé qu’une classe de sixième avait pris place autour d’elle pour un cours de mathématiques ! Aurore s’était relevée brusquement en bredouillant des excuses, mais personne n’avait réagi à sa fuite éperdue vers la sortie.

Elle n’était pas retournée au collège, depuis. Plus la rêverie l’emportait sur la réalité, plus son corps s’allégeait. Elle avait même renoncé à quitter sa chambre jusqu’à ce matin. Car ce matin était son dernier matin, elle l’avait senti. Tandis que ses paupières s’abaissent de nouveau, le vent emporte ses oreilles dans un soupir.

De l’autre côté, elle redevient Crépuscule, qui s’éveille dans le creux d’une vague. Une lune gigantesque brille de tous ses feux dans un ciel d’encre constellé d’étoiles. Crépuscule flotte sur l’eau noire, elle se laisse bercer et s’amuse à inventer de nouvelles constellations. Il lui suffit de pointer du doigt pour que les astres s’animent. Les petits points lumineux s’agitent comme des lucioles et leur ballet dessine dans l’éther ses derniers exploits. Elle se voit affronter un géant pour sauver un village, lutter contre des panthères qui attaquent les enfants, escalader une montagne à la recherche des herbes magiques nécessaires pour rompre une malédiction… Autour d’elle, des poissons crèvent la surface et restent béats devant le spectacle. Une baleine s’approche et son jet puissant éclate, la soulève et la porte en triomphe. Crépuscule rit à gorge déployée et lance des rugissements, belle et sauvage et…

Un parfum familier réveille Aurore. Elle a beau avoir perdu son nez, elle a quand même perçu ce sillage odorant. Sous les rayons déjà déclinants du soleil, Alban traverse le parc. Elle le suit du regard et le voit rejoindre quatre adolescents perchés sur un autre banc. Les garçons fument des cigarettes et entrechoquent leurs bières en s’esclaffant bruyamment. A son arrivée, ils le bousculent un peu, lancent quelques blagues et lui tendent une canette. Mais, bien que le rebord du banc soit suffisamment large pour qu’ils s’y serrent à cinq, personne ne lui offre de place. Alban danse un peu sur ses pieds, se cherche une contenance, et pour la première fois depuis longtemps, Aurore ressent pour lui un élan de pitié.

Mais Crépuscule reprend le dessus et s’ébroue au sommet d’une montagne. A ses pieds, un paysage grandiose s’étend, avec des lacs d’un bleu profond, des forêts de pins dressés comme des flèches, et, toujours plus bas, le brouillard qui monte à sa rencontre. Devant elle, le soleil se couche dans le ciel immense où les rapaces s’élancent. Les couleurs sont si vives qu’elle est obligée de plisser les yeux. Une odeur de résine l’enveloppe. En contrebas, des panaches de fumée trahissent la présence d’un village encore invisible. Elle s’engage joyeusement dans le sentier.

Peu à peu, les toits des maisons se dessinent, puis leurs murs de pierre recouverts de lierre. Crépuscule perçoit la rumeur d’une fanfare et discerne des lampions colorés. Ravie, elle accélère et esquisse même quelques pas de danse. Elle atteint l’entrée du village, si charmant dans la lumière du soir. Sur un banc de pierre, un jeune garçon assis la regarde qui approche. Elle le salue d’un sourire mais il la dévisage sans répondre, l’air très concentré. Ses yeux marron semblent passer à travers la peau pour disséquer… Quoi ? Mal à l’aise, Crépuscule trébuche sur un pavé.

Aurore ? S’écrie-t-il soudain. Aurore Blanchin ?

A l’appel de son nom, de son véritable nom, Crépuscule s’arrête net, le souffle coupé. Le garçon s’est levé et son visage s’éclaire lorsqu’il comprend qu’il a vu juste.

Ça alors ! J’ai failli ne pas te reconnaître ! C’est ton sourire. Tu ne l’as pas changé.
Comment… Comment sais-tu qui je suis ?
Tu ne me reconnais pas ?

L’expression victorieuse s’évanouit aussitôt.

Un peu honteuse, Crépuscule secoue la tête. Le garçon semble à présent au bord des larmes. Doucement, il rapetisse. Ses muscles fondent sous sa chemise et ses cheveux rebelles se rétractent en une coupe beaucoup plus courte, couleur carotte. Des taches de rousseur s’épanouissent sur ses joues rouges. Ses poings s’ouvrent et se referment. Lorsque leurs yeux se rencontrent de nouveau, Crépuscule sent comme un fil lui échapper. Elle se raccroche au souvenir, lutte avec l’énergie d’une lionne, et ramène finalement une unique image. Une salle de classe, une grande femme au rouge à lèvres cramoisi, bras croisés, et un petit garçon au tableau qui bredouille quelque chose au sujet d’une fourmi, les poings crispés et le regard au ciel, comme s’il sollicitait une intervention divine.

La cigale et la fourmi, souffle-t-elle.

Le garçon écarquille les yeux et se met à sourire si largement que Crépuscule pourrait compter chacune de ses dents.

Tu te souviens ! J’arrive pas à le croire !
Mais qu’est-ce que tu fais là ?
Ben, comme toi, j’imagine. J’ai été avalé par le Rêve.
Je ne savais qu’il y en avait d’autres, comme moi.
On est bien plus nombreux que tu peux l’imaginer, mais ce monde est infini, du coup on ne se croise pas souvent.
Comment… Comment ça se produit ? Je veux dire… Toi aussi, tu as commencé à t’effacer ?
Oui. Au début ça m’a fichu une de ces trouilles ! J’ai cru que j’allais mourir.
Et tu n’as rien dit à personne ?
Ben non, sinon je ne serais pas là. Le Rêve n’attrape que les gens comme nous, tu sais, ceux qui vivent plus intensément dans leurs rêves que dans la réalité. A force de te renfermer sur toi-même, de ne parler à personne, tu deviens tout doucement invisible… Et on t’oublie.

Crépuscule est sonnée. Le garçon s’anime.

Mais c’est la première fois que je croise un Rêveur que j’ai connu de l’autre côté ! Est-ce que tu habitais toujours à Montmoreuil  avant de disparaître ? Je me rappelle de la boulangerie de Monsieur Zahid où on essayait toujours de voler des bonbons. Enfin, moi j’ai jamais osé. Et le collège, il est toujours là ? Que je suis bête, bien sûr qu’il a pas disparu, lui. T’es en quelle classe maintenant ? C’est toujours Madame Paraduc, la principale ? Tu te rappelles quand Ludo et Zoé ont vidé tout le papier toilette dans les couloirs ? Trop drôle !

Comme elle ne répond pas, il redevient sérieux. Et, du bout des lèvres, il lâche :

Tu as revu mes parents ?

La question la frappe comme une gifle. Elle serait bien incapable de se représenter la famille de ce gamin dont elle ne se rappelle même pas le prénom. Mais, dans son esprit, surgissent aussitôt les visages de ses propres parents, d’Alban, de Mamie, de ses oncles et tantes et  cousins. Elle les imagine en train de fêter Noël sans elle, de se souhaiter une bonne année, de souffler des bougies. Elle voit s’effacer sa silhouette maigrichonne des albums photos et son manteau s’évaporer dans l’entrée de la maison. Disparue, oubliée, à tout jamais. Plus d’Aurore… Seulement Crépuscule.

Ses yeux s’emplissent de larmes. Les rayons du soleil s’éteignent un à un et même la fanfare se tait.

Hé, qu’est-ce que tu as ?
Je ne… veux pas… disparaître, sanglote Aurore.
Mais c’est pas grave, tu sais ! On est bien ici ! On peut faire ce qu’on veut, être qui on veut !
Je ne veux pas qu’on m’oublie, hurle-t-elle.

Le soleil lance un ultime rayon à travers le parc et traverse Aurore de part en part. Dans sa silhouette floue, il ne reste d’elle que deux iris gris et une étincelle de vitalité. Aurore inspire, expire, remplit et vide ses poumons invisibles, et l’étincelle grandit. Elle crépite dans son corps comme un orage miniature et réveille un à un ses membres engourdis. Les yeux obstinément ouverts, Aurore fixe ses mains et voit ses doigts réapparaître un à un. Elle saute sur ses pieds tous neufs et s’étire, secoue la tête jusqu’à ce que ses cheveux lui fouettent le visage et, d’un doigt, vérifie que ses sourcils sont bien là, tous les deux. Enfin, au-dessus de son menton, un joli sourire apparaît.

– Eh, Al, tu viens avec nous tout à l’heure ?
– Pour faire quoi ?
– Guigui a vu le père Zahid ouvrir la caisse ce matin, elle était pleine de billets. On s’est dit qu’on pourrait y faire un tour.
– De quoi, cambrioler la boulangerie ?
– Y a aucun risque, mec ! Le gars n’a même pas d’alarme. Suffit de casser un carreau, déverrouiller la porte et par ici la monnaie !
– Je sais pas…
– Allez, fais pas ta pucelle ! On fera le guet, t’en as pour dix secondes !
– Attends, tu veux que moi j’y aille ?
– Ben oui, mon gars. Tout le monde y est passé, reste plus que toi.
– Allez Al ! Prouve-nous que t’es un vrai mec !
– Al ! Al ! Al ! Al !

Alban danse toujours sur ses pieds, mal à l’aise. La bière et le joint lui font tourner la tête. Ou peut-être est-ce la perspective de dévaliser Monsieur Zahid, l’ami de ses parents ? S’il se faisait prendre… La nausée est si forte qu’il se sent à deux doigts de gerber.

– Alban ? Dit une petite voix derrière lui.

La surprise lui fait faire un bond. Mais ce n’est que sa petite sœur qui le tire par la manche.

– Aurore ? Qu’est-ce que tu fous en pyjama ?
– Il faut que tu rentres, il s’est passé un truc très grave. Très, très grave.
– Eh Al, c’est qui cette gamine ?
– Ma sœur.
– Elle s’est échappée de l’asile ou quoi ?
– Eh, tu veux une bière ?
– Il est mignon ton p’tit pyjama. Y a quoi en-dessous ?
– Il faut que tu rentres, insiste Aurore.
– OK, OK, grogne Alban.

Il tourne les talons avec un signe de la main. La bande poursuit son concert d’obscénités. Alban espère qu’ils ne lui en voudront pas trop. Aurore marche d’un pas si vif qu’il a du mal à la suivre.

– Attends ! Qu’est-ce qui s’est passé de grave ?
– Il s’est passé que tu es un idiot.
– Quoi ?
– T’allais vraiment faire ça ? Cambrioler la boulangerie ?

Alban se sentit rougir comme un gamin pris en faute.

– C’était pour rigoler. Et puis, ça te regarde pas. Occupe-toi de tes affaires.
– Pourquoi tu crois qu’ils voulaient que ce soit toi qui le fasses ? La police va les suspecter en premier parce qu’ils ont déjà été arrêtés plein de fois. Et ils vont te balancer et profiter de tout l’argent que tu leur auras rapporté et toi tu seras mort, parce que papa et maman vont te tuer dès qu’ils apprendront que tu as fait ça à Monsieur Zahid.
– J’allais pas le faire, OK ? Je suis pas débile.
– Trouve-toi de vrais amis, parce que je serai pas toujours là pour te sauver les fesses.

Aurore le plante devant le porche et entre, impériale, dans la maison. Alban est partagé entre la stupéfaction et la rage. Il inspire par petits coups, puis pousse la porte, prêt à affronter les reproches habituels sur sa tenue, son haleine, sa seule présence.

Mais ses parents ne lui jettent pas un regard. Par-dessus la table à moitié mise, ils s’interrogent :

– Qu’est-ce qu’elle faisait dehors en pyjama ?
– Aucune idée… Mais je ne l’avais jamais vue sourire comme ça.

Qu’est-ce que l’excitation ?

Jeu_Creatif

En ce moment, je publie peu, mais ce n’est pas par manque d’inspiration, bien au contraire. Je suis complètement absorbée par mon roman. Déjà plus de 200 pages d’écrites ! Et l’histoire avance bien. Je suis ravie !

Mais j’ai quand même accepté de jouer à un petit défi lancé par ma coach en écriture. Toutes les semaines, il faut répondre, par toute forme d’art, au thème proposé.

Le premier thème, c’était l’excitation. Et voici ma réponse…

 

Poumpoum tchac.

Vendredi concert

On n’arrête pas de le dire, ce confinement est une situation inédite, et cela amène souvent beaucoup d’anxiété.

Vais-je supporter l’enfermement ? Vais-je finir comme un personnage de Wall-E (oui non ça c’est juste moi qui me pose la question) ?

Mais il y a aussi ces petits moments inoubliables, qui nous aident à tenir, à nous réjouir.

Il y a des milliers de vidéos, de dessins et de textes qui résonnent dans tous les foyers. On se dit « haha, mais tellement ! »

Et il y a les initiatives qu’on nous propose, et qui sont si volontiers suivies. Depuis deux jours déjà, à 20h, des applaudissements résonnaient dans notre petite résidence. Alors, quand on a vu la proposition de concert, Kevin n’a même pas hésité une seconde. Sa batterie n’avait pas été sortie depuis 2 ans, c’était l’occasion rêvée !

C’était magique, inoubliable. Les voisins étaient ravis. L’un d’eux s’est jeté dans son garage pour prendre le relais, avec sa propre batterie. Et ensuite, après ce concert improvisé de 25 minutes, les voisins sont sortis de toutes les maisons pour discuter. Qu’on se connaisse ou pas, on a prolongé le moment et parlé de tout et de rien, sans faire attention au froid.

On est tous dans le même bateau. Faisons en sorte que celui-ci continue de voguer, rajoutons quelques airs de fête dans notre tambouille quotidienne, jusqu’à ce qu’on aperçoive enfin la terre, la liberté.